L’année 2020 s’est clôturée par la parution quasi simultanée de deux importants dictionnaires de bruxellois : la traduction française du dernier ouvrage de Marcel de Schrijver et la réédition (enrichie) du livre de Georges Lebouc.
Ces ouvrages sont très différents l’un de l’autre et me suggèrent une comparaison avec un troisième, plus ancien : un lexique du couple Starck-Claessens. Tous trois présentent des caractéristiques spécifiques et sont emblématiques de ce que le lecteur peut trouver en rayon.
Alors, lequel choisir ?
Mon tempérament perfectionniste me pousse clairement à préférer Marcel de Schrijver, en tant que meilleure référence linguistique.
Si, par contre, vous cherchez un plus large compendium, privilégiez Georges Lebouc. Starck–Claessens demeurent inégalés pour leur approche « bidirectionnelle ».
Mon conseil ?
Profitez des trois, chaque fois que vous le pourrez… non peut-être ?
Avec un délai de 3 ans par rapport à l’édition originale en néerlandais, l’ultime opus de feu Marcel de Schrijver bénéficie donc d’une traduction française : ‘t Kakkenesjke – Le dernier-né. Ce titre est judicieux, même si celui de la version originale évoque plus le testament philosophique de son auteur : ‘t es on aa naa! (Soit : à votre tour, maintenant, de prendre la relève)
Né à Jette, Marcel de Schrijver était la cheville ouvrière de l’association De Speegelmanne (Les Hommes du Miroir, en référence à la place du marché dominical jettois), qui œuvrait pour la mémoire linguistique du dialecte flamand de Bruxelles et fut également un pilier de l’Academie van het Brussels. Il nous a quitté le 18-12-2020, à l’âge respectable de 88 ans.
Marcel, Bruxellois flamand de naissance et excellent bilingue, s’est toujours basé sur le témoignage d’authentiques locuteurs (vivants) du brussels vloms. Le nombre de mots répertoriés est moindre que dans les deux autres dictionnaires, mais les explications beaucoup plus détaillées. Le texte est serré mais un mot peut faire l’objet de plus d’une page au format A4 ! Aucune intervention littéraire dans les citations si celle-ci n’émane pas de la tradition populaire. Très attaché à l’étymologie, l’auteur tient compte de l’évolution des dialectes brabançons (ou de la langue néerlandaise en général). En cas de doute, il n’hésite pas à mentionner son éventuelle circonspection vis-à-vis de la source, en particulier en cas d’hapax (mot dont les spécialistes n'ont relevé qu'un seul exemple).
L’orthographe utilisée est conforme aux règles édictées par l’Academie van het Brussels, car Marcel de Schrijver était à l’initiative de l’implication du Prof. Sera De Vriendt dans la publication d’un précis d’orthographe du brussels vloms.
Référence
Marcel de Schrijver, ‘t Kakkenesjke – Le dernier-né, Brusseleir, 2020 (387 pages).
25,-€ -- Disponible auprès de be.brusseleir,
rue de Flandre 98 – 1000 Bruxelles - 02/502.76.93
La nouvelle édition du Dictionnaire du Bruxellois constitue la « Summa Capricornica » de ce polygraphe ! Largement complété et élargi par rapport à l’édition de 2005, son ouvrage n’a pas d’équivalent : il est, avec celui de Starck-Claessens, le plus complet. Toutefois, ne parlant pas le brussels vloms (Georges Lebouc ne s’en est jamais caché), son dictionnaire colporte quelques erreurs traditionnelles (spekschaaiter, au lieu de spekscheeter ; van de Marrolle gien verveit, au lieu de ni verveid ; …).
Georges fait donc, tout naturellement, la part belle aux auteurs publiés : son approche est celle du compilateur d’un dictionnaire latin, travaillant cette langue morte ; dans les deux cas, on cite Virgile …
J’ai quelques doutes par rapport au recours systématique à une telle démarche. Comme le précise Michel Francard, de telles sources sont : écrites par des intellectuels […] qui mettent leurs connaissances linguistiques au service, non d’une transcription d’un « bruxellois » authentique, mais d’une composition littéraire, avec ce que cela suppose comme ajustements et même déformations de la réalité langagière. Malgré Francard, les références au Mariage de Mademoiselle Beulemans ou à Bossemans et Coppenolle, à Jef Kazak et à Joske Maelbeek sont, pour moi, d’une eau particulièrement pure. Joske Maelbeek a d’ailleurs étroitement collaboré à cette réédition, avec le talent qu’on lui connait.
Faut-il pour autant bouder Georges Lebouc ? Certes non, car le très riche vocabulaire proposé séduira le lecteur qui, au fil des pages, souhaitera faire plus ample connaissance avec les auteurs qu’il nous y fait découvrir !
L’orthographe proposée s’éloigne de toute volonté de standardisation puisque l’auteur honore la contrainte (scientifique) du respect des citations littéraires.
Référence
Georges Lebouc, Dictionnaire du Bruxellois (illustrations J. Carabain), SAMSA Éditions,
2020 (706 p).
35,- € -- ISBN : 978-2-87593-298-3 - dans toute bonne librairie
Le Dictionnaire bruxellois – marollien – français des époux Starck–Claessens a été édité à compte d’auteur, en 1991. En nombre de mots, il dépasse – mais de peu – la dernière édition de Georges Lebouc. Il se distingue des ouvrages décrits par le fait qu’il s’agit d’un lexique (le mot apparaît sur la couverture), c’est-à-dire une énumération de termes sans autre explication que leur traduction (une ou plusieurs). Il est donc moins contextualisé.
Par contre il présente une caractéristique majeure par rapport à ses « concurrents » : il est bidirectionnel… C’est un avantage important pour le lecteur qui n’a guère d’autres moyens de rechercher un mot bruxellois qu’il ne connait pas qu’en picorant « au hasard » dans les dictionnaires habituels ou qu’en se tournant vers des versions Internet dont la fiabilité est incertaine, voire aléatoire.
L’orthographe utilisée est celle proposée par l’Académie pour la Défense et l’Illustration du Parler Bruxellois, dont les auteurs furent, de longues années durant, la cheville ouvrière. Hélas, cet ouvrage est épuisé et ne se trouve qu’occasionnellement proposé sur le marché de la seconde main.
Référence
Starck-Claessens, Dictionnaire bruxellois
– marollien – français, Bruxelles, Lojipe S.C., 1991 (626 pages).
Épuisé.
Viviane Decuypere
04.02.2021 10:40
Si après ça, on cause pas bien sur le brusseleir !...
Derniers commentaires
14.03 | 18:06
L'orthographe correcte c'est ringard ! Il suffit de lire les sous-titres qui accompagnent le JT de la RTBF depuis des années...
Christian & Mireille
08.03 | 16:46
Je recherche un photo de ma rue de Dinant des années 1947
08.03 | 16:42
Dans les années 40 il y avais une tour d'habitations sur la place de Dînant et en face sous les travaux de la jonction un Bunker, ma mère avait un salon de coiffure au n°7 de la rue de Dînant en 1946
19.11 | 10:34
Bonjour ! Ns venons au cours demain et ferons honneur aux sandwiches